Alors que je jetais un coup d’œil sur mon GSM en train de se charger sur la table, celui-ci s’alluma suite à l’entrée d’un message. Quelqu’un m’appelait, m’avait appelé. Je réactivais l’instrument et rappelais ma fille cadette.
Comme prévu, elle était à la session des constellations familiales où elle s’était inscrite à la recherche d’une solution pour son mal être.
En quelques mots, avant de reprendre la session, elle me précisa sa participation au groupe et les réactions rapides de son corps aux premiers exercices de mise en relaxation.
Dès la marche en cercle,une violente envie de vomir s’était emparée d’elle et vu la situation, pour nr pas traîner ce mal aise, elle s’était lancée une des premières dans l’exercice.
Avec émotion, elle me rapportait les éléments principaux au sujet de la lignée des femmes et de la colère qui s’était intériorisée à propos de Germaine, son arrière grand-mère maternelle, morte de tuberculose à l’age de 26 ans quand sa grand-mère avait 6 ans. Qu’allait avoir cette mise à jour de ce fait familial.
Un peu après ma femme me rapportait les résultats d’une séance avec Kathleen où elle relevait la colère qui habitait certaine de ces relations notamment avec sa mère et sa fille cadette, celle de la constellation et celle de la sœur puînée, Anne.
L’ambiance se modifiait avec ces différentes activités, nous allions bouger, cela ne faisait plus l’ombre d’un doute.
Le lendemain, un petit sms me parvenait court , précis. « Je me sens légère. » A nouveau, ma fille cadette donnait de ses nouvelles à propos de son ressenti à cette session curieuse au moment où commençait la deuxième journée de mise en situation.
Fallait-il plus d’info pour me rassurer, m’éclairer sans doute mais cette petite phrase me semblait essentielle. Si elle se sentait si légère, c’est qu’un mystérieux poids venait d’être déposé, qu’elle ne portait plus la même chose qu’avant.
Mais qu’avait –elle déposé pour ressentir cette sensation. Etait-elle éphémère, simplement due aux émotions qui la traversaient.
Cette phrase résonnait en moi, réveillait mon expérience, me rappelait des évènements et des sensations passées et surtout qu’il y avait dans sa conscience un avant et un après, qu’à présent, elle avait un repère dans son ressenti. Mon esprit ne pouvait s’empêcher. De phantasmer, d’extrapoler à partir des faits que je ressentais et j’y voyais un futur meilleur et différent. Lentement, par petites touches, par petites résistances qui se manifestaient,par des émotions qui apparaissaient, elle allait prendre un chemin dont je n’aurais sans doute que des indices, des indications mais je l’imaginais meilleur, plus riche en perception.
Lors de notre dernière rencontre, elle m’était apparue comme entière, brusque, envahissante, elle semblait rayonner au delà de ses frontières corporelles, comme hérissée, un peu à la manière de la fable de la Fontaine, la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf.
Deux jours plus tard, de vive voix, elle me confiait son ressentiment, sa colère. Elle se sentait en colère, d’un poids qu’elle avait porté pour oublier, disait-elle. Peut-être ? La seule évidence était ce sentiment qui l’habitait, qu’ elle avait en elle, et dont elle percevait consciemment la nature et la vivacité. Puis elle me dit, « J’ai l’impression que je vais me mettre à pleurer et elle disparut pour rejoindre son lit. »
Que se passait-il en elle ? Elle avait basculé de la colère aux larmes sans avertissement, immédiatement. Ah si elle pouvait prendre conscience de ses sentiments, de ces émotions qui l’habitaient.
Un souvenir me traversa l’esprit, me ramena à cette statuette en plâtre que je leur avaient acheté chacun, il y a quelques années et qui représentait un de mes souhaits pour eux, la possibilité de voir à travers la nuit à la manière de la chouette, de voir dans leur fort intérieur les obstacles à leur devenir, à leur maturation. Comme dans le magasin, il n’a avait pas de troisième chouette, j’avais acheté un hibou au symbole différent sans doute, mais il représentait aussi le symbole de l’oiseau de nuit, le symbole de la traversée de son ombre, d’une acceptation de ce qui faisait problème en soi. Comme elle avait eu le choix en la chouette et le hibou, elle s’était tournée immédiatement vers le hibou qu’elle trouvait plus expressif.
Quelques mois plus tard ou même un ou deux ans plus tard, je me souviens encore de ma surprise de constater lors d’un regard plus pénétrant que les autres jours que le hibou était en colère.cela, je ne l’avais pas mémoriser. Ce même hibou en colère réapparaissait comme le symbole d’une projection à l’extérieur d’un vécu intérieur et une prise de conscience s’était faite à présent chez elle.
La colère nommée à la session de constellation s’était manifestée via le hibou et reconnue. Toute l’énergie utilisée pour s’en prémunir en la cachant n’était plus nécessaire d’où, semblait –il, ce poids dont elle s’était débarrassée.
Ne pouvait-on imaginer que son allure physique était un peu comme celle de l’oiseau qui gonfle ses plumes, qui se gonfle pour exprimer aux autres sa colère et la distance qu’il veut maintenir entre les autres et lui et entre lui et le sentiment qui le ronge et dont il est inconsciemment porteur. Hypothèse sans doute qui devrait un jour prochain sa concrétisation physique par une diminution de poids conforme à ses efforts de régime.
La carapace, son armure, sa susceptibilité, établie comme enveloppe, sa colère inconsciente, avait perdu sa raison de se dissimuler ce sentiment de colère et qu’elle le portait en son nom ou au nom d’une autre sa mère ou sa grand-mère, n’y changerait rien, le complexe venait d’être percé comme pourrait l’être la bonde d’un tonneau ou un ballon d’anniversaire.
Le gain essentiel de ce week-end me semblait être l’apparition de sa conscience d’une des colères enfouies en elle et qui semblait d’après le scénario mis a jour dans la lignée matrilinéaire.
Nouveau contact avec elle ce mercredi soir où comme par hasard sa mère est embarquée dans une activité de natation et la visite d’une amie en nous laissant le champ libre pour un tête-à-tête. Heureux moment d’échange, son visage s’était modifié avait pris une expression de maturité et de sérénité que je ne lui connaissait pas.
Plusieurs personnes dont son mari lui avait d’ailleurs exprimé la perception en elle d’un changement et le lui avaient dit clairement.
Oui ses traits étaient manifestement plus détendus et elle ne me donnait plus cette impression de boule de nerf que j’avais perçue, il y a quelques temps ou pour reprendre la métaphore, elle ne se gonflait plus comme le faisait un hibou avec ses plumes. Le changement qu’elle avait vécu la touchait et elle avait voulu en partager l’émotion avec sa sœur mais celle-ci était imperméable à cette sensation, à cette sensibilité nouvelle et l’échange avait tourné court.
Faire comprendre à l’autre une telle différence devient impossible car l’autre n’a pas vécu l’expérience et ne peut pas entendre le paradigme