Chutes d’arbres

La lisière d’arbres au bord de la sablière n’a plus la cohérence des jours passés. Un ensemble de branches, pend lamentablement, là au-dessus. L’incident m’intrigue, me pousse à chercher une explication. En comparant des photos prises le mois dernier avec la situation du jour, le mystère est levé. L’arbre à droite de l’ensemble où poussent quelques boules de gui, n’est plus là. Pourtant il n’y a pas eu de tempête, ces jours-ci.

Au fond du jardin, après l’escalade du talus, je suis sur l’ancienne route de service. Surprise un deuxième arbre la coupe, juste derrière le jardin. Il vient de s’effondrer, par fatigue, sans doute. Par maladie, peut-être ? Curieux des bourgeons naissaient un peu partout sur ses branches. Des images me retraversent l’esprit.

Dans l’Escavée, à 500 mètres d’ici, il y a quelques mois, un arbre s’est effondré, du bord du talus, bloquant le passage. Le sol s’était effrité, sous ses racines. Dans une autre escavée, il a aussi quelques arbres qui sont tombés. Quelqu’un les a découpés.

Cela en fait beaucoup sur une année. 

L’image, de bois des environs, se superpose, notamment ceux en allant vers la ville, le long de la rivière, sur des friches. Beaucoup d’arbres sont morts. Ils penchent lamentablement, barrant le paysage d’un trait oblique. 

Est-ce la sécheresse de l’été dernier qui leur a été fatale ? Est-ce que le sol perd sa cohésion, affaibli par le manque d’eau ?  

Le substrat maintenant les racines, n’est plus le même, en tout cas, autour de cette sablière. 

C’est une constatation de ces derniers mois.

Quelque chose a changé, trop, c’est trop. Un arbre qui se couche passa encore. C’est le signe de la vie, mais autant d’affaiblissements et de chutes ?

On parle de réchauffement climatique. N’est-ce pas, dans notre environnement, une des conséquences de celui-ci. La forte modification des pluies, leur raréfaction n’est pas bonne pour le milieu des arbres. Surtout que dans notre environnement, les terres ne couvrent que faiblement le sous-sol sablonneux. Les racines n’ont plus la terre compacte et humide pour s’accrocher et trouver leur appui, leur nourriture. Elles deviennent fragiles, cassantes. 

Que donnerait une tempête sur le peuple des arbres, ici localement ?

Signes avant-coureurs, exposant le stress causé par le changement climatique !

Qu’est-ce qui nous attend dans le futur ? 

Constellation familiale

L’’idée de cette participation, à ce type d’activité, venait de mon épouse. Elle voulait un changement dans la vie quotidienne. Prendre l’air, hors de cette ambiance morose, dans laquelle le COVID et l’âge, nous avait poussé. Était-ce du jeunisme, une envie profonde de continuer nos activités comme si de rien n’était ? 

Au fond, se risquer, à une matinée de travail personnel, d’affrontement de nos valises familiales quotidiennes. Je n’avais pas dit « Non », malgré un frein sérieux. Y avait-il, encore à notre âge, un intérêt à vouloir se changer, faire des découvertes, alors qu’on n’a plus rien à apprendre à nos enfants ? N’étions-nous pas figé par le temps, dans nos petites habitudes ?

Le souvenir d’une session personnelle de constellation familiale selon Bert Hellinger, faîte quelques années plus tôt, était toujours dans ma mémoire, et ses résultats inscrits, de manière indélébile, dans mon comportement.  Alors pourquoi ne pas prendre ce risque ? Faire un bout de chemin autre, dans cette session organisée à un peu de distance, sur une matinée.

Le groupe était limité. D’où seulement, deux constellations étaient prévues. Nous étions donc, inscrits comme représentants, comme acteur de soutien dans l’espace central où le thème des constellant(e)s se développent.

Dès l’entrée, à l’installation, pour faciliter l’audition d’une participante, j’avais cédé ma place et m’étais trouvé, plus à distance, en face de mon épouse et non plus à côté d’elle.

Surprise étonnante, la jeune dame qui se trouvait entre nous, se présenta comme « Laurence » se constellant pour clarifier ses projets concrets d’activités d’indépendantes. Étonnant retour du passé, notre fille décédée du même prénom, se trouvait symboliquement entre ses parents. Hasard ou synchronicité ?

La constellante avait traversé une dépression, n’arrivait pas à repartir, dans ses activités, se posait des questions, sur son avenir. Pour représenter le problème qu’elle traversait, elle me choisit. Je me trouvais ainsi dans son champ de travail. D’ascendance italienne, elle n’avait guère bénéficié du soutien de son père musicien, mais surtout de l’opposition de sa mère si bien que son avenir de chanteuse avait été cassé.

Le parallélisme avec les états d’âme de ma fille, les dernières années de sa vie, m’avait touché, et réveillé, au moins les émotions profondes, qui s’écoulaient doucement en larmes. Mon émotion était incontrôlable. Larmes qui sans doute n’avaient pas été livrées plus tôt vu une barrière, un barrage intérieur, ancien et incontrôlable.

De son côté mon épouse, invitée aussi par cette constellante, immédiatement après, n’avait pas accepté de jouer le rôle de sa mère.

Situation impossible, même symboliquement.

Un peu plus tard, notre constellante, nous a fait entendre un type de vocalise propre au chant Corse. Moment impressionnant exprimant ce qu’elle venait de découvrir quelques jours avant.

A la fin de cette première partie, je n’avais pu m’empêcher de penser à l’étonnement de ma plus jeune fille, face au fonctionnement familial, qu’une de ses nouvelles connaissances, italienne, lui il avait livré la semaine précédente. A savoir, la place forte et insupportable du plus âgé du clan, dans une gestion familiale qui régissait beaucoup d’aspects familiaux, jusqu’à l’acceptation ou pas de l’ami d’un petit-enfant, par la pression qu’il propageait, à sa manière, dans le quotidien familial.

Touché par son histoire, ses dons, je lui avais souhaité, à la fin de la matinée, à l’image de la colombe du grand tableau suspendu au-dessus d’un banc d’apparat, décoré de sculptures diverses, dans le local, de prendre son envol, dans ses projets futurs et surtout d’avoir la force des lions qui sur les bras du banc, symbolisaient par leur gueule grande ouverte, l’envie de se faire entendre.

N’est-ce pas logique maintenant en tant que représentant du problème du blocage qu’elle vivait, de lui souhaiter de voler, indépendante et forte, de ses propres ailes.

Là encore l’impression me vint qu’au fond en plus de ce prénom, de sa santé, par l’image renvoyée du lion, j’étais relié, à ma chère fille, dont le totem était « « Tigron »

Émotions encore face à ce symbole ravivé, mais surtout satisfaction d’avoir joué mon rôle de représentant du problème, pour aidé cette jeune dame à poursuivre sa vie, avec force et confiance et la voie qui était la sienne.

En rase campagne.

Sur le plateau au sortir de l’escavée, le chemin de terre s’allongeait devant moi et s’orientait progressivement vers la gauche. Le sol avait une teinte grise, brunâtre renforcée par la lumière blafarde de la fin d’après-midi.

Mes yeux se fixèrent sur deux tâches humides, sombres crées par des ornières élargies, ovoïdes, remplies d’eau, à une vingtaine de mètres devant moi. Je fus saisi par l’apparence étrange de celles-ci. On aurait dit des yeux qui me regardaient approcher.

« Qui regardait qui ! » La terre ou moi ? Mystérieuse symbiose, l’impression d’être observé par des yeux étranges matérialisés devant moi.

Mystère du monde dans lequel je vis, auquel je participe, par ma présence, mon activité. Suis-je le miroir d’un être mystérieux, la vibration d’un champ invisible que je tente d’exprimer bien malgré moi ?

Suis-je comme une feuille vibrante sous l’influence d’un vent ?

Suis-je un résonnateur animé par une fréquence mystérieuse ?

Cette impression fugace par le balancement de mon pas se dissipe, mon angle de vision n’est plus le même. Le mirage s’estompe, disparaît, me laisse perplexe.

Comme être vivant, j’ai une autonomie de mouvement, de penser que je semble maîtriser, que j’essaye d’améliorer.

Mais alors je ne me sens pas seul ? L’univers est en dialogue avec moi !

Dans mes pensées surgissent incongrues des idées qui ne m’appartiennent pas car leur contenu m’étonne, ne semble pas appartenir au fil de mes compétences, de mes connaissances.

Des éléments surgissent comme de nulle part et me traversent un peu comme ces yeux qui s’animent dans mon paysage visuel.

En moi, un espace inconnu difficile à localiser s’exprime, change mon point de vue et 

m’apporte des idée neuves.

Cette demi-heure de marche a été propice, mon attention n’est fixée qu’à mon pas. 

Une idée autre se met en forme, s’exprime.

Ma lecture du matin sur l’attachement a laissé des traces, la notion revient, je suis dans mes pensées, à nouveau.