Il y avait de nouveau du sang sur l’oreiller.
« Tu devrais aller voir le docteur à propos de ton oreille ! »
« Ce n’est pas mon oreille qui saigne mais c’est en dessous du bras ! »
« Ce n’est pas vrai, ce n’est pas possible ! » « Si ! »
Je me déshabillais pour lui montrer le dessous du bras droit où une grosse verrue venait d’être arrachée par mes mouvements de nuit. Sa chute avait laissé apparaître un peu de sang. Pourquoi fallait-t-il que ce soit l’oreille qui coule. C’était la troisième fois qu’elle voulait absolument situer là, l’origine de mes saignements de nez : dans l’oreille. Cela me semblait impossible. C’est toujours par le nez que cela arrive ou si c’est via l’oreille autant dire que la mort n’est pas loin.
Qu’est ce que les maux de tête pouvait bien lui rappeler et plus particulièrement les saignements de l’oreille ? Etait-ce du a ses otites quand elle était enfant ?
Anecdote sans doute, mais cette disparition d’une grosse verrue sous le bras me surprenait après avoir vécu la disparition de celles qui pullulaient sur ma pomme d’Adam, celle là, disparaissait à son tour après m’avoir fait mal comme si quelque chose avait bougé quelque part et permettait cette évacuation.
Fallait-il ramener cette libération de la verrue à la chamade qui m’avait touchée jeudi matin sur le train ?
Mon coeur et les muscles environnants battaient d’une manière bizarre et désordonnée et j’observais avec angoisse les errements de cette brave machine. Allait-t-elle me laisser tomber ? Il n’y avait pas de douleur, simplement un grand désordre, dans son rythme. Je respirais plus vite pour essayer de changer quelque chose et la panique m’envahissait. Etait ce la panne définitive ?
La journée se passa avec une présence dans la tête, de ce désordre.
Je vivais a moitié, assis pour économiser mon énergie, mes ressources. La soirée se passa tranquillement et je me mis au lit sans tarder vers 10 h pour épargner mes efforts, ma machine. Le temps s’écoulait, une nervosité incontrôlable m’empêchait de dormir, de m’abandonner au sommeil, je guettais mon angoisse. Mon coeur était toujours là, présent.
Quatre fois successivement, je me retrouvais devant l’écran de TV, verre de porto puis de bière à la main pour essayer de noyer cette nervosité, cet esprit qui chevauchait sans arrêt, sans se laisser aller au plaisir du sommeil. Celui-ci ne me terrassait pas, ne m’atteignait pas, je restais bien éveillé, mal dans ma peau. La journée se passa sans ordre, sans but, sans activité presque avec un malaise permanent, une gène dans le corps non remis à neuf par un sommeil réparateur.
Aucune idée particulière n’effleurait, ne venait me surprendre.
La nuit suivante se passa tranquillement en une fois, pour récupérer un peu de ce manque de la nuit dernière. Puis vint le week-end.
Ma verrue sous le bras avait disparu, s’était perdu comme un fruit mur qui tombait. Qu’avait-elle emporté, était-elle enracinée dans mon coeur ?
Sur internet, je voulais trouver enfin autre chose d’utile, d’efficace. Je tapais M Von Franz et tombais sur le nom d’un auteur qu’elle avait accepté de dédicacer : Arnold Mindel.
« L’inconscient parle par les rêves, les visions, les fantasmes mais aussi communique au moyen de sensations physiques qui se manifestent dans le corps. »
C’était le sens des verrues, du poireau, sur mon index, c’était le sens des nombreuses sensations que je vivais.
C’était un théoricien qui mettait en mots mon ressenti. Ses livres montraient comment par les signaux du corps, nous pouvons atteindre une plus grande compréhension de nos maux physiques et de nos émotions.
Mots d’apaisement
H13-Juin 98.